Huile de palme : évaluer la politique d’approvisionnement des entreprises
Cette huile végétale a envahi notre quotidien, la moitié des produits présents en supermarché en contiendrait. En Asie du Sud-Est, les impacts environnementaux et sociaux de sa production sont souvent dramatiques. C’est pourquoi nous nous efforçons de faire la lumière sur les politiques d’approvisionnement des entreprises qui en utilisent. Découvrez notre dernier classement.
Une catastrophe écologique
La réduction des habitats naturels couplée au braconnage a causé la disparition du dernier couple de Rhinocéros de Sumatra en 2019.
Produit bon marché, l’huile de palme est aujourd’hui omniprésente dans notre quotidien. On la retrouve aussi bien dans les produits alimentaires que dans les cosmétiques, les peintures, ou encore les agrocarburants.
Afin de satisfaire une demande croissante, la production d’huile de palme ne cesse de s’étendre au détriment des forêts naturelles denses, particulièrement dans les zones tropicales humides. Au cours des deux siècles derniers, 90% des forêts malaisiennes et indonésiennes ont été détruites et ce, en grande partie à cause de l’exploitation des palmiers à huile.
La biodiversité est en première ligne. En effet, des espèces déjà menacées, dont l’éléphant, le tigre et l’orang-outang, perdent leur habitat et sont, par conséquent, proches de l’extinction. On estime que les concessions de palmier à huile porte un coup à la biodiversité des forêts primaires et secondaires dans lesquels elles s’implantent. Une diminution allant jusqu'à 99% de la diversité des arbres et 90% de la diversité des mammifères peut être observée.
Les communautés autochtones sont également menacées. Lorsqu’elles ne sont pas directement expropriées, la dégradation de l’état des forêts les prive de leurs moyens de subsistance. Par ailleurs, les changements drastiques que connaissent ces écosystèmes impactent d’autres services qu’ils rendent au niveau régional comme la filtration, la rétention de l’eau participant ainsi à la disponibilité de la ressource hydrique et à la prévention des crues et des inondations.
A plus grande échelle, la déforestation a un impact majeur sur le changement climatique. Décimées, les forêts ne peuvent plus exercer leur fonction de stockage de carbone, les gaz à effet de serre jusqu’alors absorbés par les arbres sont désormais relâchés dans l’atmosphère.
Améliorer les pratiques
En Malaisie, nous accompagnons les petits producteurs de palme dans leur transition vers une meilleure occupation des sols et des pratiques agricoles plus vertueuses.
Pour promouvoir une production responsable d’huile de palme, le WWF participe activement à la RSPO, (table ronde sur l’huile de palme durable). Cette organisation regroupe tous les acteurs du secteur dans le but de développer et de mettre en application des normes à l’échelle mondiale concernant la production d’huile de palme durable. Nous nous efforçons d’en améliorer les exigences d’un point de vue environnemental.
En parallèle, nous travaillons avec les différentes parties prenantes de la chaîne d’approvisionnement : avec les producteurs pour les aider à améliorer leurs pratiques, avec les maillons intermédiaires pour qu’ils contrôlent leur chaînes d’approvisionnement et avec les utilisateurs finaux d’huile de palme pour les inciter à acheter des produits certifiés.
Ainsi, depuis 2009, nous établissons, périodiquement , un classement permettant d’évaluer les pratiques des entreprises et de mesurer ainsi les efforts qu’il leur reste à accomplir pour parvenir à un approvisionnement en huile de palme 100% certifiée responsable. Les politiques des principaux acteurs mondiaux de la distribution et de la restauration sont passées au crible.
Le chemin à parcourir est encore long
L'huile de palme certifiée comprend les volumes certifiés Book&Claim (Compensation), Mass Balance et Ségrégé.
Notre dernière édition passe au crible les politiques d’approvisionnement de 227 entreprises qui comptent parmi les plus gros acheteurs mondiaux d’huile de palme. Malheureusement, les résultats ne sont pas à la hauteur des enjeux. Sur un score maximal de 24, la moyenne n’est qu’à 13.2.
Une transparence toute relative
Malgré la demande croissante des consommateurs, 37% des entreprises (84/227) questionnées n’ont fourni aucune information concernant les volumes d’huile de palme utilisés et leurs origines.
Des engagements et des politiques d’achats à renforcer
Un trop grand nombre d'entreprises n’a toujours pas pris d'engagements solides qui couvrent tous les risques environnementaux et sociaux liés à leurs achats. Cela impacte négativement de nombreux habitats et communautés vulnérables. Dans les faits, certaines entreprises s’engagent mais les termes de leur politique d’achat sont trop flous et sans échéance temporelle.
« Le WWF attend des acheteurs d'huile de palme - y compris les marques les plus emblématiques du monde - qu'ils prennent leur part de responsabilité en accélérant la mise en place de plans d'action pour apporter un changement systémique et durable au secteur. »
Amélioration des chaînes d’approvisionnements directes
Des progrès notables ont été réalisés par certaines entreprises mais l'approvisionnement en huile de palme 100% RSPO n'est pas encore la norme. Seuls 60% des sondés ont indiqué que tous leurs achats d'huile de palme étaient certifiés 100% RSPO. Une situation regrettable compte tenu de l'existence d’une multitude d’options dans la chaîne d'approvisionnement et de la disponibilité de l'huile de palme RSPO.
Sur les 9,6 millions de tonnes analysées cette année, la certification ne couvrait en moyenne que 68% des volumes.
Les investissements dans les pays producteurs sont plus répandus
Le classement de 2021 révèle qu'un certain nombre d'entreprises prend des initiatives sur le terrain, 39% des répondants déclarant soutenir des projets sociaux et environnementaux dans les régions productrices d'huile de palme. Après une décennie d'inaction de la part de nombreuses entreprises, c’est un changement positif auquel tous les acheteurs d'huile de palme devraient prendre part et accélérer. Bien que les entreprises aient la responsabilité de faire évoluer leur chaîne d'approvisionnement et d'éliminer les pratiques préjudiciables, elles ne doivent pas perdre de vue l'objectif final : des économies rurales inclusives et productives où les écosystèmes naturels sont valorisés et protégés, et où les droits des communautés sont respectés.