Tête-à-tête avec les tortues marines
Kerri Major travaille au WWF Australie. Il y a quelques jours, elle a eu le privilège d’embarquer aux côtés de deux rangers aguerris pour une mission très spéciale : le marquage de tortues marines dans le Queensland. Elle nous raconte.
Une aventure tortuesque
Eddie Smallwood et Jim Gaston sont rangers depuis 25 ans. Ils appartiennent à la communauté de Gudjuda et travaillent étroitement avec le WWF Australie et l’université James Cook. Leur mission ? Protéger les tortues marines du Queensland.
Après un festin de fourmis vertes et autres mets locaux concoctés par nos hôtes, cap sur notre mission :
le marquage des tortues.
Le vent sifflait sur Bowen Bay. On a donc attendu qu’il se calme un peu pour embarquer mais ça secouait sec. Fracas des vagues et ressacs, je me cramponne au bastingage. Un peu tendue mais concentrée.
J’aperçois alors une ombre vive ondulant sous l’eau. Un cri furtif de l’oncle Eddie et voilà notre équipage qui se lance à sa poursuite. La tortue s’éloigne avec aisance. Elle semble nous échapper mais Jim plonge soudain du bateau, sans prévenir. Il se dirige droit sur elle, l’empoigne avec autant de fermeté que de douceur et la remonte à bord.
« Un peu plus tard, nous accueillons deux autres tortues. Même fascination, à chaque fois. Ne pas en perdre une miette. »
Silence émerveillé de l’assemblée. Devant tant de beauté, nous restons bouche bée. Pas sûr que notre nouvelle colocataire partage notre enthousiasme. Un peu plus tard, nous accueillons deux autres tortues. Même fascination, à chaque fois. Ne pas en perdre en miette. Nous les scrutons, mesurons leurs carapaces et procédons au marquage. J’observe avec amusement la vingtaine de bernacles qui s’est gentiment installée sur le dos de nos convives et que nous sommes parfois contraints de retirer à la pince pour prendre nos mesures.
Mais l’heure tourne. Le temps est venu de remettre nos nouvelles amies à l’eau.
Pour soulever la plus grosse d’entre elles, à peu près 60Kg, nous nous y mettons à deux. Elle prend son élan et se laisse glisser dans la mer. Forte et délicate à la fois.
C’était une journée fabuleuse que je ne suis pas prête d’oublier !
Marquer les tortues marines pour mieux les protéger
Le terme de marquage peut sembler barbare. Pourtant, c’est bel et bien pour prendre soin des tortues que nous avons recourt à ce procédé.
Baguer une tortue permet de surveiller la croissance de la population, les schémas migratoires et de tenir des registres de toute maladie ou épidémie dans la région. Ces marquages sont enregistrés dans des bases de données internationales qui alimentent des travaux de recherche et de conservation.
Au cours de la mission de marquage, les scientifiques en profitent pour mesurer la taille et le poids des tortues et vérifier leur état de santé. Nous surveillons notamment la propagation du virus fibropapillomatose qui affecte couramment les tortues vertes. Ces dernières développent des tumeurs et des bosses, bénignes au premier abord, mais qui deviennent si grandes que leur organisme s’affaiblit.
Le marquage des tortues
Le marquage consiste à poser une petite bague métallique sur les pattes postérieures de la tortue avec un numéro d’immatriculation et le lieu du marquage. Ces données permettent aux scientifiques du monde entier « d’identifier » les tortues qu’ils croisent.
Les effets du plastique sur la biodiversité
Chaque année, jusqu'à 130 000 tonnes de plastique se retrouvent dans l'océan. A l'échelle mondiale, 95% des emballages en plastique sont utilisés une fois, puis jetés.
Plus de 70% des tortues du Queensland meurent en ingérant du plastique. Les témoignages des rangers sont édifiants. A Townsville, en Australie, un hôpital dédié soigne les tortues malades et blessées.