Biodiversité : une rentrée mitigée pour Emmanuel Macron
En ouverture du congrès de l’UICN, le Président de la République a dévoilé ses propositions pour faire face à l'effondrement alarmant de la biodiversité. Quelques annonces sont à souligner mais l’ensemble reste très en deçà de l’urgence.
Pour approfondir le sujet :
Congrès mondial de la nature de l'UICN 2020Le président a fait une revue de l’existant sans annoncer de nouvelles mesures concrètes.
Parmi les 10 points que le WWF avait identifiés en amont du Congrès, le Président de la République :
- N’a pas évoqué l’avenir des subventions publiques dommageables à la nature
La France doit cesser de subventionner la destruction de la nature et renoncer d’urgence à soutenir les entreprises françaises engagées dans des méga-projets à l’étranger. A ce titre, le WWF France attendait du président de la République qu’il renonce à l’octroi d’une subvention publique de 700 millions d’euros au projet Arctic LNG 2.
Si la France ne doit pas subventionner le déclin de la biodiversité à l’étranger, elle doit aussi supprimer l’ensemble des subventions publiques dommageables à la nature. Le WWF France attendait du Président qu’il présente une méthode claire. Il appelle le gouvernement à s’y engager dès cet automne dans le projet de loi de finances pour 2022.
- A annoncé l’extension des aires protégées de Méditerranée d’ici 2027
En annonçant son ambition de porter de 0,25 % à 5% la superficie de la façade méditerranéenne d’ici 2027, le Président donne une impulsion que l’on peut accueillir afin de mieux protéger les écosystèmes marins en Méditerranée. Cette nouvelle ambition va devoir maintenant être mise en œuvre, en s’assurant de mobiliser les moyens nécessaires afin de garantir la protection forte des espèces et des habitats.
- A rappelé, sans la rehausser, l’ambition de la France pour les océans
Dans son discours, Emmanuel Macron a rappelé l’engagement de la France en faveur de la protection des océans dans le monde, sans s’engager à porter, partout où c’est nécessaire, un engagement cohérent. Ainsi, s’il a rappelé le besoin de lutter contre la pollution plastique, il n’a évoqué aucune négociation à venir d’un traité mondial sur le sujet.
Le WWF appelle la France à faire preuve de cohérence : s'engager pour un traité plastique doté d’un objectif contraignant chiffré et daté de réduction de la pollution plastique, et apporter son soutien à la proposition d’un moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins.
- A accueilli sans les imiter les engagements internationaux pour le financement de la biodiversité
Le WWF France salue l’engagement de nouveaux acteurs de la finance publique internationale tels que le FIDA à dédier 30 % de leurs financements climat à la biodiversité. Pour dépasser des encore engagements isolés, le WWF appelle les 500 banques de développement dans le monde à s’engager à l’occasion du deuxième Sommet Finance en Commun d’octobre à verdir leurs financements et à financer davantage de projets verts.
Alors que l’engagement du président français de consacrer 30 % de la finance climat à la biodiversité ne figure encore nulle part dans la loi, le WWF France appelle le gouvernement à s’en emparer d’urgence pour tendre vers les 800 millions d’euros supplémentaires de financements climat dédiés à la biodiversité, à travers le projet de loi de finances pour 2022.
« Rentrée mitigée du président de la République sur le front de la biodiversité. Nous saluons l’élargissement du Plan Méditerranée Exemplaire à 9 États ainsi que l’engagement de la France à multiplier par 25 les zones sous protection forte en Méditerranée. Mais la vision et le cap pour agir sur les racines de la crise écologique restent flous et sans consistance. Le président a fait une revue de l’existant sans annoncer de nouvelles mesures concrètes. Nous regrettons l’absence d’abandon définitif de la garantie publique à Total sur le méga-projet gazier Arctic LNG2 par exemple. Le WWF France appelle le président à concrétiser des réformes de fonds d’ici la fin du quinquennat : engager la sortie des subventions publiques dommageables à la nature, changer de braquet pour une véritable transition agricole, doter le budget français des moyens annoncés lors du dernier One Planet Summit, prévenir les 10 000 captures accidentelles de dauphins chaque année, renoncer à l’exploitation minière des fonds marins et s'engager à un objectif mondial de réduction de la pollution plastique. Plutôt que des annonces isolées, au cas par cas, le WWF France demande au président d'agir avec vision, anticipation et consistance pour intégrer la biodiversité dans les décisions à venir de France, telles que le Projet de Loi de Finances 2022 et le Plan d’investissement France 2030. » Pierre Cannet, Directeur du Plaidoyer WWF France.