La valeur des usages de l'eau est estimée à 60% du PIB mondial selon un nouveau rapport du WWF
L’eau, ressource la plus précieuse et la plus sous-estimée au monde, est aujourd’hui au cœur d’une crise mondiale de la qualité et de la quantité et qui menace à la fois la santé humaine, celle de la planète mais aussi l’économie mondiale. Pour la première fois, un rapport du WWF publié ce jour estime sa valeur économique à 58 000 milliards de dollars par an au niveau mondial. C’est l’équivalent de 60% du PIB mondial. Le WWF appelle les gouvernements, entreprises et institutions financières à prendre conscience de la vraie valeur de l’eau et de mettre en place urgemment des mesures fortes de protection et de restauration des écosystèmes d’eau douce à la hauteur de l’urgence.
Une ressource qui n’est pas estimée à sa juste valeur
La valeur économique quantifiable totale des usages de l’eau en 2021 est équivalente à environ 58 000 milliards de dollars, soit 60 % du PIB mondial cette même année.
Ce nouveau rapport, intitulé “Le coût de l’eau bon marché” estime la valeur économique quantifiable totale des usages de l’eau en 2021 à environ 58 000 milliards de dollars, soit 60 % du PIB mondial cette même année. Si l’eau présente divers avantages directs (pour les ménages, l’agriculture et différentes industries) évalués à un minimum de 7 500 milliards de dollars par an, les bénéfices indirects de l’eau douce sont eux constamment sous-évalués. Ces bénéfices, qui vont de la conservation de la biodiversité à la protection contre les sécheresses et les inondations, représentent pourtant une valeur sept fois supérieure, soit 50 000 mds de dollars par an.
Ainsi, les gouvernements et les entreprises se sont souvent concentrés sur les utilisations directes, négligeant nos rivières, nos lacs et nos zones humides. Le prix de l’eau a toujours été fixé trop bas, sans que la valeur ou la santé des écosystèmes d’eau douce ne soit prise en compte.
Nous avons perdu un tiers des zones humides depuis 1970.
Cet aveuglement, causé par un manque de prise de conscience ou de compréhension de l’importance des ressources en eau, a un coût immense : des milliards de personnes n’ont toujours pas accès à l’eau potable ni à des systèmes d’assainissement de base. Nous avons perdu un tiers des zones humides depuis 1970. 83% des populations d’espèces d’eau douce ont disparu sur cette même période et un tiers d’entre elles sont menacées d'extinction. Enfin, les risques liés à l'eau pour les entreprises et les économies augmentent - jusqu'à 46 % du PIB mondial pourrait provenir de régions à haut risque hydrique d'ici 2050 si aucune protection et restauration de ces écosystèmes n’est engagée.
Protéger, restaurer et gérer durablement les écosystèmes d'eau douce
Pour faire face à la crise mondiale de l'eau, les responsables politiques, entreprises, institutions financières doivent prendre conscience de la réelle valeur de l’eau et de la nécessité de protéger et de restaurer les cours d’eau, les lacs, les zones humides et les aquifères. Des mesures doivent être mises en place pour améliorer la gestion de l'eau et investir dans des écosystèmes d'eau douce sains afin de réduire les risques liés à l'eau, d'améliorer la sécurité de l'eau et de l'alimentation, de réduire les risques de catastrophe, de renforcer l'adaptation au climat et l'atténuation de ses effets, d'inverser la tendance à la perte de la nature.
70% de l’eau douce consommée dans le monde est aujourd’hui utilisée pour l’agriculture.
A l’occasion de la journée mondiale de l’alimentation, le WWF appelle également à la transformation des systèmes alimentaires, essentielle pour lutter contre la crise de l'eau. 70% de l’eau douce consommée dans le monde est aujourd’hui utilisée pour l’agriculture, 58% en France - en grande partie du fait de l’élevage intensif, le bétail réclamant des cultures, comme le maïs, très consommatrices d’eau, en particulier l’été, au plus fort des tensions sur la ressource.
C’est pourquoi le WWF plaide pour une végétalisation de l’assiette et plus généralement pour la transition de l’agriculture vers l’agroécologie, afin de se tourner vers des cultures qui demandent moins d’eau et des écosystèmes qui la conservent mieux, en qualité comme en quantité. En France, le sujet commence à émerger avec le plan Eau présenté en mars dernier. Le WWF France appelle à aller plus loin, en intégrant l’eau en tant que composante essentielle de la planification écologique et de la transition agroécologique.
“Depuis toujours, nous avons considéré l’eau comme une ressource acquise. Aujourd’hui, nous devons prendre la mesure de l’urgence et changer profondément notre manière d’agir. Cela doit commencer par le plan Eau récemment présenté par le Gouvernement qui se concentre sur une optimisation plutôt qu’une réduction de la consommation. Lutter contre les fuites ou encourager la réutilisation des eaux usées, ce sont de vraies solutions… mais à de faux problèmes. Le véritable enjeu est de construire un modèle moins prédateur en eau, à commencer par l’agriculture. ”
Jean Burkard, directeur du plaidoyer du WWF France