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20. octobre 2014 — Communiqué de presse

Le poumon alpin est au bord de l’asphyxie !

Le WWF plaide pour une stratégie de sauvegarde des cours d’eau alpins encore intacts

« Les interventions humaines compromettent les fonctions vitales des rivières », avertit une nouvelle étude pan-alpine conduite par le WWF. Cette étude complète sur l’état des rivières alpines conclut que seul un cours d’eau sur dix présente une résilience naturelle suffisante pour garantir un approvisionnement en eau constant, maintenir les services écosystémiques et surmonter les dérèglements climatiques.



Bien qu’elles soient l’un des écosystèmes montagneux les plus densément peuplés de la planète, les Alpes n’en abritent pas moins une grande diversité de sites sauvages parfaitement préservés. Les hauts massifs constituent par ailleurs de véritables châteaux d’eau alimentant près de 14 millions d’habitants de huit pays différents. En plus de façonner le paysage, les rivières qui les parcourent fournissent l’eau pour les besoins domestiques et agricoles, l’alimentation, l’énergie, les loisirs et revêtent une importance cruciale pour la biodiversité.



Pourtant, à l’échelle de l’arc alpin, les pressions humaines et le réchauffement climatique ont mis les cours d’eau en péril. Victimes de la construction de nombreux barrages et d’altérations morphologiques, ils pâtissent aussi de la conversion de leurs plaines alluviales en terres agricoles ou en aires urbaines, réduisant ainsi leur capacité naturelle à réguler les crues.

Un constat alarmant : 89 % des rivières alpines sont fortement affectées par les interventions humaines

L’étude baptisée « Save The Alpine Rivers ! » est la première du genre depuis 20 ans. Réalisée en partenariat avec l’Université des Ressources Naturelles et des Sciences de la Vie basée à Vienne en Autriche, elle évalue l’état de 57 000 kilomètres de cours d’eau et établit les grandes priorités de protection des rivières à partir de trois critères : l’état écologique au sens de la Directive Cadre européenne sur l’Eau,  les aires protégées au sens de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature et l’existence de plaines alluviales.



Le constat est préoccupant : en raison des interventions humaines subies ces 150 dernières années, seule une rivière alpine sur dix conserve aujourd’hui son intégrité. Pour les grands cours d’eau, la situation est particulièrement dramatique : dans les Alpes, seuls 340 km de berges demeurent écologiquement intacts, contre 2 300 km fortement modifiés, voire déjà classés comme artificialisés. Et la situation des rivières alpines ne cesse de s’aggraver. « La plupart des projets de barrages hydroélectriques sont prévus dans des zones protégées, comme sur la Soča en Slovénie, ou sur les rares cours d’eau intacts, comme l’Isel en Autriche. Ils vont donc à l’encontre des efforts de protection menés au niveau national et européen », déclare Christoph Litschauer, Responsable Eau douce du Programme alpin européen du WWF.



A l’échelle de l’arc alpin français, ce sont seulement une dizaine de rivières qui répondent aux critères de l’étude. L’Estéron, dans les Alpes-Maritimes, est l’une d’entre elles et bénéficie actuellement d’une attention toute particulière de la part du WWF pour lequel elle constitue l’une des dernières « zones refuges » à préserver. Ses 67 km presque entièrement préservés font figure d’exception. Un travail conjoint avec les acteurs locaux est mené afin de porter à connaissance le patrimoine naturel unique que constitue cette rivière et de faire émerger une volonté du territoire de la protéger durablement.

Le WWF appelle à une réflexion sur les modes de préservation et de restauration des rivières alpines

Face aux conclusions de l’étude « Save The Alpine Rivers ! », le WWF recommande des mesures de sauvegarde urgentes à prendre sur le terrain politique.  « Lorsqu’ils sont sains, fleuves, ruisseaux et plaines alluviales fournissent de nombreux services liés aux écosystèmes, notamment un approvisionnement en eau potable et une protection contre les crues », poursuit Christoph Litschauer. « Il faut donc les regarder comme des composantes essentielles des moyens d’existence des êtres humains et non comme des sources d’énergie. Mais le plus important, c’est de faire de la santé des cours d’eau naturels l’une de nos meilleures assurances-vie contre les effets du changement climatique ».



Face aux inondations aussi tragiques que coûteuses ayant frappé l’Europe ces dernières années, le WWF souligne la nécessité de renforcer la résilience des écosystèmes aquatiques dans différents scénarios climatiques. « Les événements météorologiques extrêmes étant censés devenir de plus en plus fréquents, nous devons protéger notre ‘réseau vert’, rivières et zones humides en tête, pour qu’elles apportent la meilleure réponse possible aux mutations de l’environnement », ajoute Christoph Litschauer. A l’instar des pôles, les hautes chaînes de montagnes sont beaucoup plus affectées par le réchauffement climatique que les régions équatoriales, comme en témoigne l’élévation moyenne des températures de 2,00°C notée dans les Alpes au cours des deux derniers siècles, contre 0,85°C à l’échelle mondiale.



Le WWF invite donc les pays alpins à participer et à préparer un plan d’action combinant l’ensemble des efforts destinés à préserver et protéger les tronçons fluviaux intacts, à restaurer les cours d’eau dégradés et à instaurer un équilibre entre protection de la nature et satisfaction des besoins humains.

 

Twitter: #SaveAlpineRivers