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23. octobre 2020 — Communiqué de presse

PLF2021 : Le gouvernement propose un simulacre de contreparties environnementales aux aides publiques

Un amendement de « contreparties » aux aides du plan de relance déposé par les député·e·s de la majorité devrait être discuté lundi 26 octobre en séance publique à l’Assemblée nationale. Pour Oxfam France, Greenpeace France, la Fondation Nicolas Hulot et le WWF France, membres du Réseau Action Climat, cet amendement vide de toute substance n’aura aucun impact sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Il n’est clairement pas à la hauteur des enjeux : il apparaît encore moins ambitieux que ceux portés par la majorité pendant les discussions sur les lois de finances rectificatives.

Nous appelons les député·e·s à voter de vraies contreparties écologiques contraignantes pour les grandes entreprises.

Nos 4 organisations regrettent l’attitude du gouvernement qui a joué la montre pendant plusieurs semaines avant de présenter sa version des contreparties environnementales pour atterrir sur un simulacre qui ne prévoit aucune obligation pour les entreprises de réduire leur impact climat et même aucune nouvelle obligation de comptes à rendre pour les grandes entreprises. Nous appelons les député·e·s à voter de vraies contreparties écologiques contraignantes pour les grandes entreprises inspirées de la mesure proposée par Barbara Pompili et 77 député·e·s LREM en PLFR3.

 

Alors que le plan de relance et le projet de loi de finances prévoient plusieurs milliards d’aides publiques aux entreprises, des acteurs de la société civile et décideurs publics demandent à ce que ces aides soient assorties de contreparties. Voici un décryptage expliquant pourquoi la proposition du gouvernement n’est pas à la hauteur.

Aucune nouvelle obligation pour les grandes entreprises

Les grandes entreprises sont celles qui ont l’impact carbone le plus important mais également les moyens de transformation les plus grands.

L’amendement de la majorité demande aux entreprises de 50 salarié·e·s et plus de faire un bilan d'émission de gaz à effet de serre à transmettre fin 2022. Les grandes entreprises de 500 salarié·es étant déjà légalement obligées de fournir un tel bilan, elles ne se voient donc demander aucune nouvelle contrepartie et notamment aucune obligation de réduction de l‘empreinte carbone n’est demandée.

Les grandes entreprises devraient pourtant être les premières visées par des contreparties : ce sont celles qui ont l’impact carbone le plus important mais également les moyens de transformation les plus grands. Certain·e·s député·e·s de la majorité veulent attendre que l’Union européenne légifère pour renforcer le reporting des grandes entreprises. Cela reviendrait à perdre plusieurs années et passe complètement à côté de l’enjeu : celui d’une baisse obligatoire des émissions, qui n’est pas à l’ordre du jour des débats européens.

Aucune trajectoire de réduction des émissions demandée et un bilan carbone en-deçà de la réglementation existante

Le bilan carbone demandé ne contient pas d'objectif de réduction contraignant aligné sur les objectifs de l’Accord de Paris.

L’amendement de la majorité demande un bilan carbone limité aux émissions de scope 1 (c’est à dire les émissions directes liées à la fabrication du produit) sans objectif de réduction contraignant aligné sur les objectifs de l’Accord de Paris. Ce bilan simplifié ne prendrait ainsi pas en compte les émissions indirectes liées à la consommation énergétique ou à l’utilisation des produits et services (scope 2 et 3), contrairement aux normes internationales de reporting déjà en vigueur. Par ailleurs, l’amendement ne demande aucun objectif ou trajectoire de réduction aux entreprises concernées.

La contrepartie doit permettre la transformation de l’entreprise ; un bilan, sans objectifs de réduction contraignants et moyens associés, la cantonne à un simple exercice de communication.

Aucune sanction pour les entreprises qui bénéficient des aides en cas de non respect de la loi

En l’absence d’objectif de réduction, la contrepartie sera de fait non contraignante, puisque les entreprises ne seront pas sanctionnées en cas de niveaux d’émissions trop importants. Demander aux entreprises une véritable contrepartie écologique c’est leur permettre de mieux répondre aux futures crises économiques et écologiques.

Par ailleurs, d’après l’exposé sommaire du gouvernement, « l’objectif de ce nouvel outil est de fournir des estimations précises pour mieux orienter les mesures de soutien aux entreprises ». Sauf qu’en raison des échéances retenues, trop lointaines, le soutien exceptionnel aux entreprises compris dans le plan de relance aura déjà été dépensé.

La proposition des ONG pour une véritable éco-conditionnalité

Les ONG ont formulé une proposition d’amendement alternative qui prévoit qu’en contrepartie des aides versées aux grandes entreprises dans le cadre du PLF, les entreprises soient tenues de publier :

  1. Un bilan carbone renforcé et standardisé couvrant les scopes 1, 2 et 3 sans prise en compte dans le calcul des émissions évitées et compensées
  2. Une stratégie climat adossée à une trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre, définie par le Commissariat général du développement durable, en concertation Haut Conseil pour le Climat
  3. Un plan d’investissements permettant de mettre en œuvre cette stratégie

En cas de non-respect de l’obligation de publication ou de l’objectif de réduction fixée, l’entreprise devra être sanctionnée, a minima à hauteur du montant de l’aide perçue. Il s’agit d’une conditionnalité ex post qui ne bloque pas le décaissement de l’aide mais instaure un vrai principe de redevabilité.

Cette proposition rejoint un amendement porté en Projet de loi de finances rectificative 3 par Barbara Pompili, alors encore députée, et 77 autres député·e·s de la majorité. Les ONG avaient d’ailleurs adressé une lettre ouverte au Premier ministre l’appelant à reprendre cette proposition. Une demande laissée sans réponse…

Plusieurs député·e·s de différents groupes (PS/FI/GDR), y compris de la majorité (porté par Laurianne Rossi et 18 autres député·es LREM), continuent de soutenir des amendements en ce sens.