Priorités du WWF pour la présidence française de l’Union européenne (PFUE)
A partir de ce 1er janvier, la France endosse la Présidence de l’Union européenne (PFUE) pour une durée de 6 mois. Alors que seront discutés des sujets décisifs pour le climat dans les prochains mois au niveau européen, le WWF compte sur la France pour placer l’écologie au cœur de son agenda, en facilitant les négociations avec honnêteté et ambition afin de dépasser les intérêts nationaux et électoraux.
Afin que cette séquence serve au mieux le climat et la biodiversité, le WWF a listé les grandes priorités à suivre durant toute cette présidence :
L’Europe, une puissance environnementale au-delà de ses frontières avec comme levier les règles du marché unique
Nous appelons la France à renoncer à cette alliance d’Etats pro-nucléaire et pro-gaz, pour défendre une taxonomie fondée sur la science et non dévoyée par les intérêts nationaux des différents Etats européens.
L’Europe peut utiliser le marché unique européen comme levier de la transition dans l’Union européenne (UE) et au niveau mondial en imposant ses normes au reste du monde (« standard-setter »). C’est le principe du projet de législation sur la déforestation importée mais de bien d’autres textes qui seront traités sous présidence française pour faire évoluer les règles du jeu économique, financière et commerciales en Europe et au-delà :
- La taxonomie : en établissant la première classification verte des activités économiques, l’Union européenne s’est positionnée pour être leader au niveau mondial. La première liste d’activités durables au regard des enjeux climatiques a été adoptée le 8 décembre dernier, malgré la tentative de la France et de 12 autres Etats pour la faire rejeter, avec la volonté de la prendre en otage pour influencer la publication imminente d’une seconde liste devant inclure le gaz et le nucléaire.
Nous appelons la France à endosser le rôle de la Présidence du conseil de l’Union européenne en renonçant à cette alliance d’Etats pro-nucléaire et pro-gaz, pour défendre en tant que Présidente une taxonomie fondée sur la science et non dévoyée par les intérêts nationaux des différents Etats européens.
- La prise en compte de la durabilité par les entreprises : amener les grandes entreprises et les PME à fort impact vers plus de durabilité en renforçant leur reporting extra-financier et en améliorant leur gouvernance.
- La lutte contre la pêche illégale : grâce à une traçabilité des produits transformés de la mer et la mise à l’agenda d’une législation sur l’importation de crevettes exemptes de captures accidentelles de tortues (toutes sur la liste rouge de l’UICN). Cette loi devra permettre de mettre fin au dumping environnemental que l’Europe exerce face aux Etats-Unis qui ont imposé cette norme pour l’importation vers leur marché il y a plus de 30 ans.
Décarboner en Europe et hors de l’Europe : la preuve à domicile pour l’action climatique
De nombreux pays européens se sont engagés à la COP26 à sortir des aides publiques aux projets internationaux fossiles ou encore du charbon, du gaz fossile et du pétrole. Les dirigeants politiques européens y ont également rappelé leur volonté de tenir l’engagement des 1,5°C de l’Accord de Paris. Alor que les rapports scientifiques convergent pour rappeler le rôle crucial de cette décennie, la présidence française devra permettre de concrétiser à domicile cette ambition en dotant l’UE d’un véritable plan pour assurer une baisse des émissions au delà des 55% en :
- Renforçant le prix du carbone à travers une réforme ambitieuse du marché carbone européen passant notamment par une suppression à brève échéance des quotas gratuits, la suppression des surplus de quotas et la baisse du total des quotas d’émissions ;
- Transformant le nouveau Fonds Social Climat en un Fonds aidant les ménages à investir dans la rénovation de leur logement ou l’achat d’une voiture peu émettrice au lieu que ce Fonds compense les dégâts sociaux causés par la mise en place précipitée d’un marché carbone bâtiment-transport ;
- Obtenant un Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières ambitieux couvrant les secteurs à fortes émissions et dont les revenus seraient utilisés pour aider les pays tiers dans leur action climatique ;
- Obtenant la fin de vente des véhicules thermiques en 2035 et même plus tôt.
Nature, climat, même combat !
Alors que la Commission européenne a proposé une bonne base de travail pour lutter contre la déforestation, elle a en revanche fait de très mauvaises propositions sur les bioénergies qui perpétueront la déforestation à l’étranger et empêcheront une reforestation en Europe.
Alors que la Commission européenne a proposé mi-novembre une bonne base de travail pour lutter contre la déforestation et éviter que des produits qui contribuent à la destruction d’écosystèmes naturels à l’autre bout du monde soient vendus dans nos rayons, elle a en revanche fait de très mauvaises propositions sur les bioénergies qui perpétueront la déforestation à l’étranger et empêcheront une reforestation en Europe.
La présidence française devra :
- Perfectionner le texte sur la déforestation importée par l’intégration des écosystèmes naturels non forestiers (savanes, prairies, zones humides) et des produits liés à leur conversion (maïs, poulet, hévéa). Nous saluons le choix de la France de confier ce texte au Conseil Environnement (et non Agriculture) qui conditionnera beaucoup l’angle et le point d’atterrissage des négociations.
- contrer la proposition de la Commission de perpétuer des subventions néfastes au climat et à la biodiversité en incitant financièrement au développement des biocarburants de 1ère génération et à la combustion d’arbres au titre des “énergies renouvelables”.
- Contrer l’intégration de tout le secteur agricole dans le règlement sur l’usage des sols et forêts (LULUCF) ce qui amènerait à compenser les émissions de ce secteur par la plantation d’arbres - au lieu de les réduire à la source.
- Œuvrer pour un objectif de restaurer 15% des terres et des mers en Europe d’ici 2030 afin d'accroître la résilience des écosystèmes face au dérèglement climatique et de recréer des puits de carbone indispensables pour atteindre la neutralité carbone en 2050.