Le lynx fait son come-back dans les Vosges

On dirait un chat. C’est pourtant le plus grand félin d’Europe. Avec sa fourrure tachetée, ses oreilles ornées de pinceaux noirs et ses favoris, le lynx boréal (Lynx lynx) a frôlé l’extinction il y a quelques décennies. Aujourd’hui, malgré une apparente stabilité de ses effectifs, l’espèce demeure menacée. La première cause de sa mortalité, ce sont les collisions avec les voitures liées à l’intensification des axes routiers. Ainsi, tous les ans depuis les années 2000, ce sont en moyenne 4 lynx qui sont victimes d’un accident routier. Les autres causes de sa disparition sont difficiles à établir car on ne retrouve pas toujours les carcasses pour les expertiser.

A ce jour, on estime la population européenne de lynx boréal à 9 500 individus, si l’on exclut les effectifs russes. Comme elle est extrêmement morcelée, toute atteinte à chacun des noyaux relictuels de population risque encore de réduire son aire de répartition. Si l’UICN classe le félin « en préoccupation mineure » en raison de sa large distribution et de ses effectifs stables, la France, elle, l’a placé dans la catégorie « en danger » sur sa liste rouge des espèces menacées.

Le WWF sensibilise la population dans les régions où le lynx a failli disparaître. L’un de nos objectifs est de réduire le conflit entre les humains et les animaux afin que le félin puisse à nouveau prospérer. La protection de l’espèce est inexorablement liée à celle de son habitat. Voilà pourquoi le WWF travaille principalement dans les Carpates, qui hébergent les plus grandes populations européennes de lynx.

Nous contribuons également à la réintroduction de l’animal dans le massif du Pfälzerwald (Rhénanie-Palatinat, Allemagne) depuis 2015. Ce projet “LIFE Luchs” prévoit l’introduction d’une vingtaine d’individus de la sous-espèce lynx des Carpates (Lynx lynx carpathicus), en provenance de Suisse et de Slovaquie.

En France, le WWF s’est mobilisé depuis 2018 pour aboutir à l’élaboration d’un plan national de conservation du lynx en partenariat avec la Société Française pour l'Etude et la Protection des Mammifères (SFEPM).

 

C'est la première portée de lynx boréal observée dans les Vosges du Nord depuis le 17ème siècle ! Les deux petits seraient nés au printemps. Leur mère Lycka, âgée de 10 ans, a été relâchée dans la nature en mars 2020 en Allemagne, dans le massif frontalier du Palatinat, en même temps que 19 autres lynx, 8 mâles et 11 femelles. Grâce à un collier GPS, les déplacements de l'animal étaient suivis avec attention. Les scientifiques savaient que la femelle avait passé la frontière à la fin du mois de mars 2020, profitant de la continuité écologique offerte par la Réserve de Biosphère Pfälzerwald-Vosges du Nord pour rejoindre l’hexagone. C'est son absence de déplacement durant une période prolongée qui a laissé penser à l'équipe franco-allemande que Lycka avait mis au monde des petits. Début juin, sa portée a pu être localisée et vérifiée par les inspecteurs de l'environnement de l'Office Français de la Biodiversité. Deux petits, âgés d'environ 3 semaines et bien portants, ont été observés à l'entrée du gîte, la mère se tenant à proximité.

C’est un symbole fort de reconquête qui enchante tous ceux qui s’impliquent pour la préservation de la biodiversité dans la région Grand Est. Ces naissances sont le fruit d’une belle coopération entre agents de l’OFB, naturalistes et partenaires institutionnels. Toutefois, à ce jour, seule une dizaine d’individus sont recensés sur l’ensemble du massif, Lycka étant la seule femelle connue. Comme l’illustrent tristement le cas de ce lynx abattu illégalement début 2020 dans les Hautes-Vosges, ou encore les collisions ayant entraîné la mort des lynx Lucky et Labka dans le Palatinat, trop de menaces pèsent encore sur l’espèce. L’enjeu majeur de la coexistence du Lynx avec les activités humaines est d’ailleurs au cœur du Plan Régional d’Actions en faveur du Lynx dans les Vosges.