Le retour des chimpanzés en RDC
Alors qu’on les croyait disparus, les chimpanzés à face blanche réapparaissent dans la Réserve de biosphère de Luki, en République démocratique du Congo, pour la plus grande joie des chercheurs.
Le coeur vert du continent africain
5 000 km² de forêts primaires sont détruits chaque année en République démocratique du Congo.
Le bassin du Congo abrite une grande variété de forêts, de cours d’eau, de montagnes, de savanes et de marais, autant d’écosystèmes qui foisonnent de vie : plus de 450 espèces de mammifères et plus de 1 000 espèces d’oiseaux s’y sont établies ! Il fournit aussi nourriture, eau et abri à près de 80 millions de personnes. Malheureusement, la déforestation et l’exploitation irraisonnée de ses richesses menacent les peuples autochtones et les espèces animales qui y vivent.
Les chiffres sont alarmants. En République démocratique du Congo, pas moins de 5 000 km² de forêts primaires sont détruits chaque année. 1 % seulement de la population historique des éléphants de forêt y est encore en vie. Quant aux gorilles de Grauer, ils ont vu leurs effectifs décliner de façon drastique. Essentiellement chassés pour leur viande, ils sont passés de 17 000 en 1990 à 3 800 aujourd’hui… Au milieu de cet environnement largement altéré par l’activité humaine, subsiste un îlot, dernière relique de l’ancienne forêt dense du Mayombe. C’est la réserve de biosphère de Luki, au sud-ouest du pays.
Gérer durablement les forêts et protéger la faune
En 2005, sous l’impulsion du WWF, la signature d’un traité régional de conservation inédit en Afrique aura permis de créer 4,5 millions d’hectares d’aires protégées, de renforcer la promotion de l’exploitation forestière responsable et surtout d’établir une coopération internationale sans précédent. Depuis, le WWF joue dans la région un rôle déterminant dans la lutte contre le commerce illicite, notamment à travers TRAFFIC, le plus grand réseau mondial de surveillance du commerce lié aux espèces sauvages. Nous soutenons la création d’accords entre gouvernements pour permettre la libre circulation du personnel du parc transfrontalier et des patrouilles communes, afin de renforcer les opérations anti-braconnage. Grâce au dévouement du personnel, le nombre de gorilles de montagne dans le parc national des Virunga est passé de 380 à 480 en moins de dix ans.
Une présence avérée
Le chimpanzé étant une espèce rare et en danger, l'enjeu de sa conservation est majeur.
Si la Réserve de biosphère de Luki est réputée pour ses essences forestières, la diversité de sa faune n’est pas sa caractéristique première. Et pourtant… Il y a quelques temps, certains récits ont commencé à émerger, accréditant la thèse selon laquelle la région abriterait des populations de grands singes, en particulier des chimpanzés. Bien que ces témoignages aient été accueillis avec beaucoup de scepticisme, une équipe de chercheurs a décidé de se pencher sur le sujet. En décembre 2020, les professeurs Jean Semeki et Cédric Vermeulen, respectivement de l’Université de Kinshasa et de l’Université de Liège en Belgique, ont donc quadrillé le parc à l’aide de pièges caméras destinés à objectiver la présence des animaux.
Quelques mois après l’installation du dispositif, le mystère de la présence des chimpanzés était levé. La Réserve de Luki abrite bien quelques individus de Pan troglodytes verus. Pour les chercheurs, cela ne fait aucun doute, si l’espèce est ainsi revenue dans la région c’est que les conditions sont de nouveau propices à son installation. En d'autres termes, nous commençons à récolter ce que nous avons semé depuis une dizaine d’années via nos différents projets de conservation. Grâce à nos efforts, la qualité de l’habitat des grands singes s’est améliorée, ces derniers s’y sentent donc en sécurité. Les arbres et l’ensemble de la végétation sont désormais protégés et cela profite aux habitants de la forêt. Le chimpanzé est une espèce rare et en danger, si l’on s’en réfère à la liste rouge de l’UICN. L’enjeu de sa conservation est majeur. La présence désormais certifiée du primate représente donc une opportunité pour la protection de la Réserve de biosphère de Luki.