Le retour du cerf-cochon dans le Grand Mékong
Quatre cerf-cochons ont été photographiés dans la province de Kratie au Cambodge. Des clichés prometteurs qui, au-delà d’attester de la présence de l’animal dans la région, pourraient être le signe d’une recrudescence de l’espèce…
Un joyau en péril
La région du Grand Mékong abrite une biodiversité exceptionnelle : tigres d’Indochine, éléphants d’Asie, ours, oiseaux, léopards, raies géantes et poissons-chats peuplent ses forêts tropicales et ses montagnes, ses rivières paisibles et ses torrents glacés. Près de 70 millions de personnes dépendent directement du fleuve Mékong et des territoires qui le bordent pour subvenir à leurs besoins en eau, nourriture et autres services essentiels. Mais entre 1973 et 2009, la région a perdu près d’un tiers de sa couverture forestière au détriment de l’expansion agricole et des mines de charbon. La croissance démographique, entraine une demande grandissante en ressources naturelles et en infrastructures et vient aggraver les pressions exercées sur les trésors naturels que renferme la région. Le cerf cochon (axis porcinus) autrefois très répandu, est aujourd’hui inscrit sur la liste rouge des espèces menacées de l’UICN en raison de la fragmentation de son habitat mais aussi de la chasse car privé d’habitat, l’animal est aussi plus exposé au braconnage…
Préserver la biodiversité unique du Grand Mékong
Pour mettre un terme à la déforestation, le WWF multiplie les projets axés sur la création d’aires protégées, la gestion durable des forêts et de la production agraire ainsi que la lutte contre l’exploitation forestière illégale. Face à la menace grandissante du braconnage, devenue la seconde cause de déclin des espèces après la perte d’habitat, le WWF et l'Union Internationale pour la conservation de la nature (UICN) ont créé en 1976 le réseau de surveillance du commerce de la faune et de la flore sauvages connu sous le nom de TRAFFIC. Sa mission est de s'assurer que le commerce d'espèces sauvages ne menace pas la conservation de la nature. Nous travaillons également en étroite collaboration avec les gouvernements, le secteur de l’industrie et des ONG partenaires pour assurer une gestion et une exploitation durable des ressources qui ne mette pas en péril l’exceptionnelle biodiversité du Grand Mékong.
Le cerf-cochon revient dans le grand Mékong
On pensait l’espèce éteinte dans la région. Mais en 2006, quelques spécimens sont aperçus au loin par des populations locales. Et il y a quelques jours à peine, pour la première fois, quatre cerf-cochons, dont trois femelles et un mâle adultes, se font photographier via des caméras pièges en train de brouter tranquillement. Le dispositif de surveillance avait été installé au cœur d’une aire protégée de 2678 hectares en plein milieu d’un champ de riz suivant les conseils avisés des populations riveraines qui avaient décelé la présence de l’animal dans cette zone. Un peu plus tard, des empreintes plus petites ont également été repérées autour des caméras-piège, attestant de la présence d’un cinquième cerf-cochon, sans doute un juvénile.
Si ces clichés nous apportent la preuve tant attendue que l’espèce est bel et bien revenue dans la région, ils semblent également témoigner, au vu du nombre de protagonistes sur les images, d’une certaine vitalité de la population dans la zone. Quant aux propriétaires du champ de riz où les caméras piège ont été installées, ils ont rejoint les patrouilles de surveillance anti-braconnage. Initialement opposés à la présence des animaux ils sont aujourd’hui convaincus que le cerf-cochon joue un rôle fondamental dans l’équilibre de l’écosystème et représente un véritable atout pour le développement d’un éco tourisme fondé sur l’observation de la biodiversité locale.