Quand la spiritualité rencontre l’écologie
Au Népal, les effectifs de la grue Antigone augmentent. Une nouvelle qui réjouit autant les mystiques que les naturalistes car si l’oiseau joue un rôle écologique important, il occupe également une place privilégiée dans les croyances locales.
Pour approfondir le sujet :
Effet PandaL’oiseau de la paix
Pouvant atteindre 1m80 de haut, la grue Antigone est le plus grand oiseau volant du monde.
Vivant essentiellement sur le sous-continent indien, son habitat est constitué de zones humides, de marais et de rizières, où elle trouve toute la nourriture dont elle a besoin : poissons, amphibiens, crustacés mais aussi végétaux. La légende raconte que Bouddha aurait soigné une grue Antigone tombée juste devant lui. Mais son cousin Siddhartha se mit à revendiquer l’oiseau sous prétexte que c’était lui qui l’avait abattu. Le roi Shuddhodana résolut alors le différend en déclarant que la grue devait appartenir à celui qui avait pris soin d’elle et non à celui qui l’avait blessée. Depuis, la grue Antigone est devenue un symbole de paix. Pour les Hindoues et les Bouddhistes, elle est l’incarnation de l’Humanité, si vous la tuez, vous risquez de provoquer une famine, une pénurie d’eau, des inondations mais aussi des problèmes conjugaux.
Hélas, en raison de la perte de son habitat liée aux activités humaines, à la pollution et aux perturbations de ses aires de reproduction, l’espèce est aujourd’hui en péril...
Protéger son habitat
Dès la première décennie de son existence, le WWF s’est attaché à reconquérir les zones humides.
La grue Antigone est une espèce migratrice qui niche dans les prairies humides du Népal pendant sa période de reproduction. Pour sauvegarder l'espèce, il faut donc avant tout préserver son habitat. Un véritable défi, tant ces milieux naturels sont sous-estimés, sacrifiés au profit de l’agriculture intensive, de l’industrie ou de l’urbanisation. En un siècle, les hommes ont altéré la moitié des zones humides de la planète.
Depuis, au Népal et partout ailleurs où les zones humides sont menacées, nous menons des actions très diverses, touchant aussi bien à la maîtrise foncière, au génie écologique, à l’étude et à la protection des espèces qu’à la pédagogie et à la sensibilisation. Grande ou petite, chacune d’entre elles contribue à la sauvegarde d’un patrimoine d’exception.
Un programme de recherche indispensable
Au cours des mois d'avril et de mai, 28 équipes ont quadrillé une large zone couvrant 113 sites à travers le Népal. Au total, 690 grues Saras ont été identifiées.
C’est sans doute le projet de suivi le plus complet et le plus ambitieux jamais entrepris sur l’espèce qui vient tout juste de s’achever. Le programme, organisé conjointement par la Société géologique du Népal et le Département central de zoologie de l'Université de Tribhuvan, avec le soutien financier du WWF Népal et de l'International Crane Foundation, a permis de mener une étude approfondie sur la répartition, la population et l'habitat de la grue de Antigone.
Jusqu'ici, les données sur Sarus Crane étaient incertaines. Sa population était estimée à un chiffre compris entre 400 et 700 specimens, avec beaucoup d’interrogations sur ses zones de nidification. Au cours des mois d'avril et de mai, 28 équipes ont quadrillé une large zone couvrant 113 sites à travers le Népal, soit un décompte systématique opéré à grande échelle. Au total, 690 grues Saras ont été identifiées, la plupart se concentrant dans la région de Lumbini, qui se trouve être aussi le lieu de naissance de Bouddha.
Au-delà du recensement des individus, l’étude visait à mieux connaître la répartition géographique de l’espèce et les défis à relever pour la conservation de son habitat. Au départ, les équipes pensaient que le décompte, effectué pendant la saison sèche, serait peu optimiste. Elles ont donc été agréablement surprises et considèrent que si le recensement avait eu lieu pendant la mousson, les résultats seraient encore plus prometteurs… Les chercheurs ont aussi été ravis de constater, en croisant les populations riveraines au cours de leur enquête, que ces dernières étaient particulièrement favorables à la protection de cette espèce emblématique dont l’apparition est souvent considérée comme un heureux présage pour les récoltes.