Quand l’écologie rime avec le féminisme
Dans le sud de la Tanzanie, les efforts de conservation contribuent à renforcer la résilience des communautés face au changement climatique tout en améliorant la condition des femmes. Un projet “win-win” !
Pour approfondir le sujet :
Effet PandaLes femmes davantage exposées
Avec quatre millions d’animaux sauvages, dont les célèbres “big five” (éléphant, lion, léopard, buffle, rhinocéros), la renommée des grands espaces tanzaniens n’est plus à faire.
Avec quatre millions d’animaux sauvages, dont les célèbres “big five” (éléphant, lion, léopard, buffle, rhinocéros), la renommée des grands espaces tanzaniens n’est plus à faire.
Tapissé de savanes herbeuses et de forêts sèches, au sud du pays, le district de Nachingwea abrite une myriade de communautés qui dépendent de l'agriculture de subsistance. Ces dernières, dont la diversité alimentaire est très insuffisante, sont hélas particulièrement exposées à l'intensification des sécheresses et des inondations provoquées par l'aggravation de la crise climatique.
Et au sein de ces communautés, où des inégalités très fortes demeurent entre les sexes, les changements climatiques impactent les femmes de manière disproportionnée ! En effet, celles-ci y sont majoritairement cantonnées aux tâches ménagères et leur accès aux ressources financières est réduit, ce qui les expose encore davantage à l’intensification des impacts climatiques et accroît leurs difficultés à s’adapter à leurs conséquences : mobilité géographique, sociale, adaptation de l’habitat ou de l’alimentation...
Le projet CARE-WWF Alliance
L’objectif : créer de nouveaux systèmes alimentaires qui permettent de mieux nourrir les communautés vulnérables tout en préservant les écosystèmes naturels.
Dans le district de Nachingwea, la forêt de miombo fait partie d'un réseau forestier vital qui abrite certains des plus grands troupeaux d'éléphants d'Afrique. Malheureusement, la zone est également soumise à des activités illégales d'exploitation forestière et de braconnage en raison du taux de pauvreté élevé au sein des communautés riveraines.
Le projet CARE-WWF Alliance a été lancé pour améliorer la résilience des femmes et de leurs communautés via la promotion de pratiques agricoles intelligentes face au climat et le soutien d’opportunités de subsistance durables.
L’objectif : créer de nouveaux systèmes alimentaires qui permettent de mieux nourrir les communautés vulnérables tout en préservant les écosystèmes naturels. Le projet a été mis en œuvre dans six villages de décembre 2015 à juin 2019.
Changement de paradigme
Jusqu'ici, la plupart du temps, les efforts de conservation et les projets de développement socio-économique étaient cloisonnés. Et surtout, les populations riveraines n’étaient pas suffisamment concertées. Ces dernières se voyaient imposer des restrictions _ “N'allez pas dans cette zone, ne coupez pas d'arbres.”_ sans entrevoir les bénéfices qu’elles pourraient en retirer.
Dès l’origine, Alliance CARE-WWF a voulu rompre avec cette approche, les porteurs du projet reconnaissant clairement l'interdépendance des défis environnementaux, économiques et sociaux. Comment les communautés peuvent-elles subvenir à leurs besoins et acquérir une stabilité financière tout en protégeant la biodiversité de leur région? C’est de cette question qu’est né le premier projet de l'Alliance CARE-WWF en Tanzanie.
Via le projet CARE, les agricultrices ont pu expérimenter des pratiques agricoles respectueuses du climat qui ont conduit à une augmentation de 94 % des rendements !
Dans le district de Nachingwea, les agriculteurs, en l’occurrence, majoritairement des agricultrices, avaient l’habitude de pratiquer la culture sur brûlis. Via le projet CARE, une formation concrète a été dispensée par l'École d'agriculture et de commerce, pour permettre aux agricultrices d'expérimenter non seulement de nouvelles variétés de cultures, mais aussi des pratiques agricoles respectueuses du climat, parallèlement à leurs pratiques traditionnelles.
Par exemple, faire tourner les cultures sur la même terre pendant plusieurs saisons en utilisant des variétés résistantes au climat. L’adoption de ce type de pratiques a conduit à une augmentation de 94 % des rendements !
"Ce projet a contribué à réduire la faim, à améliorer les infrastructures et à augmenter la production agricole. Le village de Mbondo… [est devenu] le leader de la production de sésame dans le district."
En outre, des formations en commerce et en marketing ont doté les agricultrices des compétences nécessaires pour développer leurs propres métiers verts, comme la fourniture de semences résistantes à la sécheresse ou la vente de miel, de savon ou de vêtements confectionnés de manière durable. Au final, les femmes ont créé 53 % des nouvelles petites ou moyennes entreprises soutenues par le projet. Cela les a aidés à diversifier leurs sources de revenus, augmentant ainsi leur résilience face au changement climatique.
Par ailleurs, près de 42 000 hectares de forêt ont été mis à l’abri grâce à une gestion forestière participative. Pour les communautés de Mbondo et Majonanga, la récolte durable du bois a généré 31 306$ en deux ans, soit 60 fois le revenu moyen d'un agriculteur tanzanien.
95 % de cette somme ont été alloués aux communautés pour leur permettre de financer des projets de développement local : la construction d’une école maternelle et la garantie d’une assurance maladie pour les personnes âgées vulnérables.