Un havre de paix pour les grands cétacés du Chili
L’histoire de l'île chilienne de Guafo, c’est un peu celle d’une rédemption. L’ancienne station baleinière foisonne aujourd’hui de vie ! Elle est devenue un coridor écologique pour les rorquals bleus, les baleines à bosse et bien d'autres animaux marins…
Pour approfondir le sujet :
Effet PandaRécit d’un massacre orchestré
Chaque année, près de 1 000 baleines sont tuées à des fins commerciales.
Sans les baleines, qui culminent au sommet de la chaîne alimentaire, les écosystèmes marins seraient totalement bouleversés. Hélas, sur 13 espèces de baleines à fanons, presque la moitié sont menacées.
Pendant près d’un siècle, les hommes ont méthodiquement massacré ce géant des mers pour son huile qui servait à éclairer les villes, lubrifier les machines, fabriquer la margarine, le maquillage ou le savon. Des stations baleinières ont même été construites, il s’agissait de ports abritant des usines au sein desquelles le lard des baleines chassées était directement transformé en huile…
Aujourd’hui encore, la chasse demeure le facteur de mortalité le plus important pour ces cétacés. En effet, malgré un moratoire et une interdiction du commerce international des produits baleiniers, chaque année, près de 1 000 baleines sont tuées à des fins commerciales. Les produits chimiques toxiques, les collisions avec des bateaux, les prises accessoires dans les filets de pêche, la pollution sonore et le réchauffement climatique constituent d’autres risques sérieux pour ces animaux.
Le WWF riposte
À sa création en 1961, le WWF appelle à la création d’un sanctuaire baleiniers et l’adoption d’un moratoire sur la chasse baleinière commerciale.
En 1961, date de création du WWF, 66 000 baleines sont tuées. Face à ce carnage, nous appelons à la création d’un sanctuaire baleiniers et l’adoption d’un moratoire sur la chasse baleinière commerciale.
En 1979, le premier sanctuaire baleinier qui couvre l’océan indien voit le jour et en 1986, un moratoire suspendant toute chasse commerciale est mis en œuvre.
Malgré cette mesure, trois pays continuent à chasser les baleines à des fins commerciales (la Norvège, le Japon et l’Islande). Le WWF poursuit donc ses efforts de plaidoyer pour que le moratoire soit appliqué plus fermement. En parallèle, parce qu’on ne protège bien que ce que l’on connaît bien, le WWF mène des actions d’observation et de suivi scientifique sur le terrain. Lancé en 2016, le projet WHERE, notamment, explore la distribution spatiale et l’habitat des baleines à bosse sur l’ensemble de l’espace maritime de la Nouvelle-Calédonie.
Les mentalités changent !
Le WWF travaille avec dix communautés autochtones à la création d'une zone protégée de 2 253 Km2 autour de l'île de Guafo.
Dans les années 20, l’usine tournait à plein régime au cœur de la station baleinière de l'île Guafo. Aujourd’hui, on distingue encore des cheminées effondrées, quelques briques de chaudières éparpillées et des restes de fondations, ultimes témoignages de l’époque où certaines espèces de baleines furent chassées jusqu’à l’extinction.
Les chasseurs de l’époque n’avaient pas choisi ce lieu par hasard. Guafo se trouve dans le golfe du Corcovado, qui sépare le Chili continental de l'île de Chiloé. Grâce à l'apport d'eau douce, provenant de la fonte des glaciers andins, le krill s’y développe en abondance, ce qui en fait une aire d’alimentation et de reproduction idéale pour les rorquals bleus. C'est également un arrêt fréquent pendant l'été austral pour d'autres cétacés, notamment les baleines à bosse, les orques et les baleines franches australes.
Ce couloir, où sévissait autrefois le pillage des animaux, en regorge désormais ! En effet, depuis la fermeture de la station baleinière, petit à petit, les espèces semblent reconquérir la zone. Les équipes du WWF, qui ont amarré leur navire de recherche dans les environs, s’émerveillent du spectacle : des otaries bondissant sur les rochers glissants, un groupe de dauphins de Peale semblant effectuer un ballet en nageant et même, une baleine à bosse remontant à la surface pour prendre sa respiration !
Certes, le rétablissement de telles espèces sera long mais diverses initiatives devraient permettre d'accélérer les choses, à l’instar de la création du parc marin Tic-Toc Golfo Corcovado, une zone marine protégée de 1 020 Km2, en juillet dernier. De son côté, le WWF travaille avec dix communautés autochtones à la création d'une zone protégée de 2 253 Km2 autour de Guafo. Cette dernière devrait être administrée par des membres de la communauté locale Huilliche, dont les ancêtres, pour certains, ont travaillé, par nécessité, dans l’industrie baleinière. Tout un symbole !