Le Jour du dépassement
Ce mercredi 2 août, nous avons consommé toutes les ressources que notre planète peut régénérer en une année. Si la date du Jour du Dépassement semble avoir reculé cette année de quelques jours, cela est dû à un changement de calcul, et la réduction est bien trop lente par rapport à l’urgence. Afin d’illustrer au mieux notre consommation déraisonnée des ressources naturelles, le WWF France a souhaité faire cette année un focus sur l’eau douce, rare et pourtant essentielle à notre survie.
A partir d’aujourd’hui, nous vivrons 5 mois dans le rouge en entamant le capital naturel nécessaire au maintien de la vie sur Terre.
Calculée par le Global Footprint Network, la date du 2 août correspond à la date à laquelle l’humanité a consommé (empreinte écologique) l’ensemble des ressources que la Terre peut reconstituer en une année (biocapacité). Autrement dit : pour régénérer ce que l’humanité consomme aujourd’hui, il nous faudrait l’équivalent de “1,7 Terre” en termes de surface. A partir d’aujourd’hui, nous vivrons 5 mois dans le rouge en entamant le capital naturel nécessaire au maintien de la vie sur Terre. Si cette année, la date du Jour du dépassement a reculé de 5 jours par rapport à l'année dernière, les avancées réelles représentent toutefois moins d'un jour. Les quatre jours restants sont dus à l'intégration d'ensembles de données améliorés dans la nouvelle édition des comptes.
En France, le jour du dépassement est tombé cette année le 5 mai. Un très mauvais signal : si toute l’humanité consommait comme les Français, nous aurions besoin de 2,9 planètes. En effet, malgré tous les engagements pris par les décideurs politiques, les hauts sommets organisés, nous n’avons pas réussi à faire reculer cette date, qui stagne en France depuis des années.
Actuellement, il nous faut 1,7 Terre pour regénérer ce que l'humanité consomme.
Illustration de notre consommation non durable des ressources : l’eau douce
En France, c’est plus de la moitié de la ressource en eau consommée (58%) que nous utilisons pour irriguer seulement 7% des terres agricoles.
Le jour du dépassement doit nous alerter sur notre accaparement des ressources naturelles. L’eau douce en est un bon exemple. Car la planète bleue est composée à 97% d’eau salée et l’eau douce, essentielle pour notre survie, est une ressource rare, que nous devons dès à présent sauvegarder. Depuis quelques années, le réchauffement climatique a permis de montrer les failles autour de notre gestion de cette ressource, qui menace les futurs approvisionnements en eau et rend les écosystèmes beaucoup moins résilients.
Le problème principal réside dans la répartition inégale des usages. 70% de l’eau douce disponible dans le monde est utilisée pour l’agriculture. En France, c’est plus de la moitié de la ressource en eau consommée (58%) que nous utilisons pour irriguer seulement 7% des terres agricoles*. Ce déséquilibre des usages peut avoir de graves conséquences - des villages privés d’eau potable, menace sur la sécurité alimentaire - qui nous amènent aujourd’hui à réfléchir à des solutions systémiques.
Les solutions existent, il est grand temps de les mettre en œuvre !
Afin de garantir à tous un accès à l’eau, il est urgent de mettre en place une utilisation partagée et durable de la ressource. Ce qui passe par deux grands leviers :
- La transition de l’agriculture vers l’agroécologie : les pratiques agroécologiques (couverture des sols, agroforesterie…) permettent une meilleure résistance des surfaces aux épisodes de sécheresse, un meilleur stockage de l’eau dans les sols et une meilleure recharge des nappes d’eau souterraines. Le WWF France soutient, en partenariat avec la Chambre d’Agriculture des Pays de la Loire, un projet d’agroforesterie, afin d’accompagner les agriculteurs dans, notamment, la plantation de haies. Cette technique a pour objectif de rendre plus résilients les sols, en les maintenant plus souvent à l’ombre et de permettre une meilleure rétention de l’eau. Enfin, un signal positif doit être envoyé par les décideurs : une opportunité se dessine à la rentrée avec le Pacte et Loi d’Orientation et d’Avenir pour l’Agriculture. Le WWF France appelle à ce que cette future Loi d’Orientation donne enfin un cap clair : celui de la transition agroécologique.
- Les solutions fondées sur la nature : en restaurant des cours d’eau, des zones humides, des tourbières, nous améliorons la résilience de la nature face aux épisodes climatiques extrêmes et nous améliorons l’état quantitatif et qualitatif de la ressource en eau. Un projet de loi sur la restauration de la nature est actuellement en cours de discussion au niveau européen. Plus de 1,2 millions de citoyens ont déjà apporté leur soutien et interpellé leurs députés européens pour que le texte soit à la hauteur de l’urgence.
Yann Laurans, directeur de la biodiversité terrestre du WWF France
“Ce 2 août marque cette année le jour du dépassement. Malgré les engagements pris par nos décideurs, les rencontres internationales et COPs qui se suivent, la date du jour du dépassement ne recule pas et nous continuons à creuser cette dette écologique. Notre modèle actuel est basé sur la prédation de ressources naturelles : l’exemple de l’eau douce le montre bien. Le risque de manquer un jour d’eau est croissant dans beaucoup de territoires, pourtant aujourd’hui dans le monde, 70% de cette ressource est prélevée pour la production alimentaire, et surtout les céréales qui nourrissent le bétail. On sait que notre modèle agroalimentaire actuel est une cause majeure du jour du dépassement. Nous ne pouvons plus nous cacher et attendre que le jour du dépassement avance encore. Nous avons les solutions, notamment l’agroécologie, les solutions fondées sur la nature et la végétalisation de notre alimentation. Il est grand temps de les mettre en œuvre !”
Le jour du dépassement depuis 2014
Chaque année, la date du jour du dépassement avance inexorablement.
Agissons pour inverser la tendance !