Maroc et Tunisie : vers l’adaptation au changement climatique avec les ONG locales
Le Maroc et la Tunisie subissent déjà de plein fouet les conséquences du changement climatique. Les deux pays doivent sans attendre prendre des mesures appropriées aux enjeux du réchauffement sur leurs territoires. Pour mobiliser les acteurs publics sur la question de l’adaptation, nous travaillons de concert avec les ONG locales.
Pour approfondir le sujet :
Dérèglement climatique, Objectif : Climat & Énergie, Objectif : Vie des forêts, ProjetsDeux régions particulièrement exposées
Les projections climatiques actuelles du GIEC estiment que d’ici 2050, la Tunisie connaîtra une augmentation moyenne annuelle de sa température de +2.1°C.
Face à des épisodes de pluie et de neige de plus en plus rares et à l’augmentation de la température, le Maroc et la Tunisie s’apprêtent à devenir des régions de plus en plus arides. Entre 1999 et 2002, la Tunisie a connu l’une des plus grosses sécheresses depuis le 15ème siècle. Ces épisodes, qui s’annoncent de plus en plus fréquents, risquent bientôt de peser sur la ressource naturelle la plus indispensable à notre survie : l’eau. D’après les projections climatiques, le réchauffement sera à l’origine de près d’1/5ème des pénuries d’eau dans la région d’ici 2050.
De plus, avec 1 835 km de côtes pour le Maroc et 1148 km pour la Tunisie, ces deux régions sont aussi fortement menacées par l’augmentation du niveau des mers. Ce sont près de 16 000 hectare de terres agricoles qui risquent d’être submergés par les eaux, mettant à mal toute une partie de l’économie des pays.
Des conséquences dramatiques
L’agriculture représente 13% du PIB et 37.2% des emplois au Maroc (Banque Mondiale, 2016)
La désertification des terres, une pénurie des ressources en eau et les risques d’inondation et de submersion par les mers sont un danger pour l’activité économique de ces régions, basée principalement sur l’agriculture. En Tunisie, le secteur agricole représente 9.2% du PIB, le Maroc 13%. Le manque d’approvisionnement en eau ou la submersion des terres est un danger pour le maintien des cultures et donc pour la production. Ce secteur représentant 15% des emplois en Tunisie et 37% des emplois au Maroc, les conséquences climatiques auront aussi un impact sur les populations locales, et particulièrement rurales, qui risquent fortement de perdre leur emploi.
En plus d’effets directs, le changement climatique peut aussi avoir un effet aggravant. Par exemple, les forêts, les garrigues, les zones humides ou encore les terres non-agricoles, déjà très impactées par les activités humaines, voient leur dégradation s’accélérer avec les effets du réchauffement. Les sols se dégradent par exemple plus rapidement, et les écosystèmes forestiers sont de moins en moins capables d’assurer leur fonction de séquestration du carbone. Face à ces catastrophes annoncées, le Maroc et la Tunisie doivent faire preuve de résilience et développer dès aujourd’hui des mesures concrètes d’adaptation au changement climatique.
Influencer les acteurs publics avec les ONG locales
Des ONG locales capables d’influencer les acteurs publics
15, c’est le nombre d’ONG tunisiennes et marocaines formées à terme, pour influencer la mise en place de mesures d’adaptation au changement climatique.
Le bureau régional de WWF Afrique du Nord travaille déjà depuis quelques années sur les questions d’adaptation au changement climatique. Depuis juillet 2018, le WWF mène un projet au Maroc et en Tunisie qui vise, grâce à un renforcement de capacités des ONG locales, la mobilisation des acteurs publics pour la mise en place de politiques d’adaptation solides et adaptées aux enjeux locaux. Pour ce projet, 3 écosystèmes menacés ont été identifiés : l’eau, le littoral et les forêts.
Afin de permettre à une trentaine d’ONG locales identifiées dans les deux pays d’être force de plaidoyer, le WWF a proposé plusieurs formations sur les connaissances scientifiques du changement climatique, les techniques de plaidoyer, ou encore la gestion de projet. 15 organisations en Tunisie et 15 organisations au Maroc œuvrant pour la résilience aux changements climatiques ont d’ores et déjà bénéficié de ces enseignements. Regroupées dans un “réseau” structuré par le projet, ces ONG sont désormais capables d’établir une stratégie de plaidoyer, et à l'occasion d’ateliers organisés avec les acteurs publics, de leur présenter des recommandations d'adaptation pour les trois écosystèmes vulnérables.
Ce réseau d’ONG a d’ailleurs commencé à mettre ses nouvelles connaissances en pratique au travers de projets d’adaptation pilotes. En Tunisie, afin de valoriser l’écosystème lagunaire de Maâmoura (site RAMSAR), l’Association de Protection du Littoral de Maâmoura (APLM) a mené des campagnes de sensibilisation et des travaux de réhabilitation des abords de la zone humide. Des citoyens ont ainsi été formés à la collecte de données pour l’observation de l’avifaune. Le cordon dunaire a été réhabilité et des panneaux didactiques explicitant les différents services écosystémiques de la lagune, en particulier son potentiel de régulation des effets du changement climatique, ont été installés. L’Association tunisienne de la Continuité des Générations (ACG) a, elle, mis en œuvre une stratégie globale d’adaptation au changement climatique pour préserver les îles Kneiss. Un comité de suivi et de surveillance des espaces naturels de la réserve (eau, biodiversité marine, biodiversité aviaire) a été mis en place, ainsi qu’un ensemble d’indicateurs de suivi du changement climatique au sein de la réserve.