Protéger les tigres, c’est aussi protéger la biodiversité et les écosystèmes
Les actions menées pour la conservation des tigres présentent des avantages pour la protection de la biodiversité et la sauvegarde de services écosystémiques critiques pour l’économie et le bien-être de millions de personnes en Asie, voici ce que révèle le rapport du WWF “Beyond the Stripes: save tigers, save so much more”. Cette publication intervient sept ans après le Sommet du Tigre de Saint-Pétersbourg, où les 13 États qui abritent encore des tigres s’étaient engagés à doubler leur nombre d'ici 2022*.
Capital naturel et services écosystémiques essentiels
A l'heure actuelle, les espaces habités par les tigres chevauchent des écosystèmes d'importance mondiale, dont dix sites inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Les espaces encore habités par les tigres - qui vont des forêts de mangroves de Sundarbans, les plus grandes forêts de ce type au monde, aux forêts tempérées dans les montagnes enneigées du Bhoutan - chevauchent des écosystèmes d'importance mondiale. Parmi ceux-ci figurent quatre points chauds mondiaux de biodiversité, 332 zones clés pour la biodiversité et dix sites inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Ces zones riches en biodiversité abritent un capital naturel et des services écosystémiques essentiels pour l’économie asiatique et pour des millions de personnes, : atténuation du changement climatique à la protection de l'eau douce, réduction de l'impact des catastrophes naturelles ou encore amélioration de la santé des populations locales.
Bien au-delà de la protection des tigres
Selon le rapport, la conservation de ces paysages pourrait contribuer à protéger au moins neuf grands bassins versants qui régulent et fournissent de l’eau douce à environ 830 millions de personnes en Asie, y compris dans les grands centres urbains à travers l’Inde, la Malaisie et la Thaïlande. De même, la protection de ces paysages permettrait de sauvegarder les dernières forêts, essentielles pour séquestrer le carbone et ainsi lutter contre le changement climatique.
Pourtant, les tigres sauvages sont en voie de disparition, et leurs habitats sont menacés. Ayant perdu 95% de leur aire de répartition, les populations de félins sont maintenant fragmentées et confinées dans les derniers espaces forestiers en Asie. Mais le rapport souligne que, même au sein de ces espaces résiduels où les tigres se déplacent, 43% de leurs habitats pourraient bientôt être perdus en raison de l'expansion agricole et de l'urbanisation.
Perte de l'habitat : une des principales menaces
Si nous ne parvenons pas à sauver les tigres, nous risquons de perdre beaucoup plus.
Les pertes de forêts se poursuivent à un rythme alarmant dans les Etats de l’aire de répartition des tigres. La Malaisie et l'Indonésie figurent parmi les principaux émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre liés à la déforestation. À Sumatra, seul lieu au monde où les tigres, les orangs-outans et les rhinocéros cohabitent, la déforestation a réduit la couverture forestière naturelle de plus de 50% au cours des trois dernières décennies.
La perte de ces espaces et de biodiversité a un coût considérable pour le continent asiatique et pour l’humanité. La conservation de ces espaces contribue donc aussi à la prospérité économique de l’Asie, de manière directe à travers l'écotourisme et l'emploi, et indirecte à travers les services écosystémiques fournis par ces espaces, dont la perte est onéreuse.
“Investir dans la conservation des tigres permet de sécuriser des services écosystémiques essentiels, de protéger d’autres espèces menacées telles que l'éléphant d'Asie, le léopard et l'orang-outan, qui partagent leur habitat avec les tigres. Et c’est aussi investir dans le futur de millions de personnes dont les moyens de subsistance dépendent de ces espaces, et donc contribuer à un développement économique soutenable de l’Asie. Si nous ne parvenons pas à sauver les tigres, nous risquons de perdre beaucoup plus."
Stéphane Ringuet, Responsable Programme Commerce des Espèces Sauvages au WWF France
*En novembre 2010, les chefs d’Etat et de gouvernements ont approuvé un plan global de sauvegarde du tigre (GTRP - Global Tiger Recovery Programme), avec pour objectif de doubler le nombre de tigres d'ici 2022, appelé TX2. Dans ce cadre, les 13 États (qui abritent encore des tigres) se sont donc engagés notamment à mieux protéger les habitats du félin.