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Tigre du Bengale dans le parc national de Bandhavgarh (Inde)

Doubler la population mondiale de tigres

C’est sans doute la stratégie de restauration la plus ambitieuse jamais entreprise pour une seule espèce. En 2010, alors que le nombre de tigres est au plus bas, les gouvernements des 13 pays qui abritent encore le félin s’engagent à multiplier sa population par deux d’ici 2022. L’initiative Tiger X 2 est lancée.

Une espèce en sursis

Au cours du siècle dernier, le nombre de tigres a diminué de 95%. Les populations de tigres de Java, de Bali et de la Caspienne ont disparu dans les années 1950. La population mondiale a atteint un niveau historiquement bas de 3 200 individus alors qu’elle était estimée à 6 000 individus dans les années 2000.

En tant que grand prédateur, Panthera tigris joue un rôle clé dans le maintien de la bonne santé de son écosystème et des services vitaux rendus par ce dernier aux autres espèces et aux populations locales : approvisionnement en nourriture et en eau douce, notamment. On parle d’espèce parapluie car sa protection garantit celle des autres espèces avec lesquelles il partage son habitat. Par sa seule présence, le félin renforce également l’attractivité de la zone dans laquelle il vit. Stimulant l’activité touristique, il procure des sources de revenus alternatives aux communautés vivant autour de son aire de répartition. 

Mais aujourd’hui, le félin est gravement menacé. En danger d’extinction, l’espèce est inscrite sur la liste rouge de l'UICN. Recherché pour sa peau mais aussi pour diverses parties de son corps, supposées soigner plusieurs pathologies dans la médecine traditionnelle chinoise, Panthera tigris est victime d’un trafic international, exercé par de puissantes mafias. Si sa chasse est désormais interdite, en Asie, on continue de tuer le tigre pour s’approprier symboliquement sa puissance, fabriquer des médicaments utilisés dans la médecine traditionnelle ou encore pour en faire des articles de décoration, des tentures, des tapis ou des objets souvenirs. De 2000 à 2018, 1142 saisies de tigres ont été réalisées dans 32 pays, correspondant à 2359 tigres, soit au moins 124 animaux par an. La destruction de son habitat constitue également une menace sérieuse pour le félin. Il ne subsiste plus aujourd’hui que dans 7% de son aire de répartition historique et 43% de ses habitats restants pourraient bientôt être perdus en raison de l’expansion agricole et de l’urbanisation.

Doubler le nombre de tigres d’ici 2022

Le collet : plus grande menace pour les tigres

Le piège (collet) est la plus grande menace pour les tigres en Asie du Sud-Est. On estime à 12 millions le nombre de collets posés dans les zones protégées du Cambodge, du Laos et du Viêt Nam, pays où les tigres sont déjà localement éteints.

Heureusement, le tigre dispose d’un sérieux atout. Il appartient à une espèce qui se reproduit facilement, pour peu qu’elle ait assez de proies, un peu d’espace et qu’on arrête de la pourchasser ! L’espoir de voir sa population se rétablir est donc permis. 

C’est pourquoi le WWF a initié Tiger x 2 (Tx2), l'objectif mondial consistant à doubler le nombre de tigres sauvages d'ici 2022. En 2010, lorsque le nombre de félins a été estimé à moins de 3 200, les 13 pays dits du tigre (Bangladesh, Bhoutan, Cambodge, Chine, Inde, Indonésie, Laos, Malaisie, Birmanie, Népal, Russie, Thaïlande, et Vietnam) se sont engagés à atteindre l’objectif de 6 000 animaux d’ici 2022, la prochaine année du Tigre de l’horoscope chinois.

Pour évaluer leur nombre et garder un œil sur eux, nos experts utilisent des pièges photographiques. Grâce à ces caméras infrarouges qui détectent les mouvements, nous récoltons des informations précieuses sur la façon dont les félins se déplacent et se reproduisent. Les experts du WWF ont ainsi photographié plus de 500 tigres sauvages, chacun identifiable par ses rayures uniques, telles une empreinte digitale. Soit plus de 15% de la population mondiale estimée selon le dernier recensement à 3 890 individus.

Une grande part de l’initiative Tx2 repose sur le leadership des gouvernements des pays de l'aire de répartition du tigre. Mais les communautés locales et les entreprises implantées aux alentours de l’habitat des tigres sauvages ont aussi un rôle fondamental à jouer. Faire de la place pour accueillir une population croissante de l'un des plus grands prédateurs nécessite des efforts d’acceptation et d’adaptation. C’est pourquoi nous les plaçons au cœur de notre stratégie et de notre travail quotidien. Des organisations locales, nationales et internationales, des universités, des agences et des experts de la conservation, du commerce et de la protection de la faune sauvage, viennent également nous prêter main forte.

Unité de patrouille de tigres du WWF (Rimbang Baling, Sumatra).

Des résultats prometteurs

Pour la première fois, les efforts de conservation ont permis d’inverser la courbe de diminution de la population mondiale de tigres depuis le début du XXème siècle. 

En Inde, pour éviter les représailles contre le tigre, le WWF apporte une aide financière provisoire aux propriétaires dont le bétail a subi les assauts du félin dans la réserve du Kanha et dans des sections sensibles de la réserve de Pench Tiger. 

En Malaisie, le WWF a lancé le projet Stampede qui forme les communautés locales à la surveillance anti-braconnage via le système SMART (Spatial Monitoring And Reporting Tools). Les dix patrouilles, une cinquantaine de personnes issues principalement des peuples indigènes d’Orang Asli, ont aidé à retirer des centaines de pièges tendus par les braconniers et contribué à signaler aux autorités plusieurs camps de braconnage et autres activités suspectes. Depuis le lancement du projet, le nombre de pièges repérés a baissé de 89%. En septembre 2020, sept pièges actifs seulement ont été détectés sur plus de 8 000 km patrouillés à pied à Belum-Temengor. 

En Indonésie, une vaste campagne de sensibilisation a été menée au sein des communautés vivant aux abords des réserves de Rimbang Baling et de Bukit Betabu, bastions du tigre. L’objectif ? Inciter à l'abandon des activités de braconnage et de conversion des forêts via la promotion d’alternatives de subsistance durables, telles que l'écotourisme et l’agriculture biologique en partenariat avec YAPEKA et INDECON. En 2019, suite à cette initiative, la communauté du village de Tanjung Belit (voisin de la réserve de Rimbang Baling), a publié son code coutumier et sa loi de régulation du village afin de protéger 300 hectares de forêt. 

En 2016, la population mondiale de tigres sauvages était estimée à environ 3900 animaux contre 3200 six ans plus tôt. Pour la première fois depuis un siècle, les effectifs du félin ne déclinent plus, ils augmentent même régulièrement, se renforçant dans des pays comme l’Inde, le Népal et la Russie. Toutefois, il reste encore des efforts à faire pour atteindre l’objectif Tx2, soit environ 6000 tigres en 2022. D’autre part, si l’approche quantitative est importante, l’approche « qualitative » doit l’être aussi, à savoir qu’au-delà du nombre de tigres, il est fondamental de s’assurer qu’ils forment des populations viables installées sur des grands espaces non fragmentés, leur permettant de se maintenir et de se développer.

Tigre du Bengale dans le Ranthambhore National Park, Rajasthan, Inde.
Tigre dans les arbres

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