La chasse au loup interdite en Espagne
Le 4 février dernier, l’Espagne a mis un terme à la chasse au loup sur son territoire. Une décision historique qui montre que la valeur du grand carnivore pour le patrimoine culturel et les écosystèmes qui l’abritent est enfin reconnue !
Ni ange, ni démon
Le loup (Canis lupus) est classé comme espèce protégée depuis la signature de la convention de Berne en 1990.
Du Petit Chaperon Rouge aux Trois Petits Cochons, en passant par La Chèvre de monsieur Seguin, les contes pour enfants lui donnent toujours le mauvais rôle. Aujourd’hui encore, le mythe du grand méchant loup a la dent dure.
Pourtant, l’animal est craintif et discret, les chances de le croiser demeurent minimes et si l’occasion se présentait, il serait le premier à détaler. Mais cela ne suffit pas à apaiser les tensions entre l'homme et le loup, particulièrement vives dans les zones que l’animal avait désertées et dans lesquelles il est revenu depuis peu.
Les éleveurs et les chasseurs doivent réapprendre à vivre avec le risque de prédation du grand carnivore sur le bétail et sur le gibier et certains l’acceptent mal.
En effet, lorsqu'il ne parvient pas à se nourrir de proies sauvages, telles que les ongulés, ses principales cibles, l’animal est capable de jeûner pendant une semaine. Mais par facilité, il peut aussi être conduit à s'en prendre au bétail domestique, ce qui, hélas, provoque de nombreux conflits avec les hommes. Comme tous les grands carnivores, le loup est inscrit sur la liste rouge des espèces menacées de l’UICN en France. Depuis la signature de la convention de Berne en 1990, cet animal appartient à la catégorie des espèces protégées. Cependant, le conflit Homme-loup continue de peser sur la survie de l’espèce.
Redorer son blason
Pour aider à la protection du Loup (Canis lupus) en France le WWF a financé pendant plus de 15 ans le programme "Pastoraloup".
Pour réhabiliter le loup et lui donner une chance de se réinstaller durablement dans nos régions, la bataille est avant tout idéologique. Faire évoluer les mentalités en défaisant les idées reçues.
Nous sommes convaincus que la cohabitation avec le grand carnivore est possible, c’est pourquoi, dans de nombreuses régions du monde où l’Homme et le loup sont en conflit, nous développons des programmes et menons des campagnes de sensibilisation. Pendant plus de 15 ans, nous avons financé le programme "Pastoraloup", déployé dans l’hexagone et porté par l’association FERUS. Recours aux chiens de protection mais aussi renforcement de la présence humaine aux côtés des troupeaux, installation de clôtures appropriées, expérimentations d’effarouchement, tout un dispositif pour aider les bergers à faire face aux attaques de loups.
Nous intervenons également dans les instances nationales institutionnelles pour porter le message d’une coexistence harmonieuse. Nous y défendons une approche transnationale, via le réseau européen du WWF et à travers le programme EuroLarge Carnivores, dans la mesure où les populations de loups ignorent les frontières et doivent être prises en compte de façon cohérente et globale à l’échelle du continent.
Le loup reprend son souffle
Depuis les années 1960 la population de loups ibériques (Canis lupus) est passée de quelques centaines à environ 2000 individus.
En Espagne, fini la chasse au loup. Jeudi 4 février, le pays a finalement décidé d’inclure le canidé sur la liste des espèces sauvages sous protection spéciale. Jusqu’à présent, le fleuve Duero constituait une ligne de démarcation nette. Au sud, les meutes de loups y étaient protégées, mais au nord, la chasse contrôlée y était encore autorisée. Désormais, c’est sur la totalité du territoire que la chasse est bannie.
La proposition a été présentée par la Commission d'État pour le patrimoine naturel du ministère de la Transition écologique et du Défi démographique et a nécessité un second vote car le premier avait débouché sur un match nul, même nombre de voix pour les partisans du loups que pour ses détracteurs.
Finalement, une majorité simple, nécessaire pour adopter la décision, lui a donné le feu vert, donnant ainsi le même statut de protection à toutes les populations de loups du territoire.
Au nord du Duero, ce résultat fait grincer des dents. La Cantabrie, les Asturies, la Castille et León et la Galice ont voté contre la proposition. Ces quatre régions, qui concentrent 95 % de la population de loups en Espagne, regrettent que les voix de certaines régions aient fait pencher la balance en faveur de l’interdiction de la chasse aux loups, alors qu’elles n’ont qu’une faible (voire aucune) population du spécimen sur leurs terres. Mais du côté des défenseurs de l’environnement, la décision est applaudie. Enfin, le rôle inestimable du loup pour le patrimoine et les écosystèmes qui l'hébergent semble établi.
Depuis les années 1960, la population de loups ibériques en Espagne est passée de quelques centaines à environ 1 500–2 000 individus. Une belle progression, certes, mais qui demeure encore insuffisante, d’un point de vue écologique, pour restaurer durablement l’espèce. Proscrire la chasse c’est avoir le courage de légiférer pour redonner un avenir à un animal emblématique, aussi précieux pour notre culture que pour notre environnement !