La technologie à la rescousse des ours polaires
En Arctique, les drones révolutionnent le suivi scientifique des espèces. Ils facilitent la collecte de données en la rendant plus sûre, plus rapide et plus économique.
Seigneur de la banquise
Plus de 2/3, soit 66,6% de la population d'ours polaire pourrait disparaître si la fonte de glace se poursuit au rythme actuel.
Ursus maritimus signifie « ours de la mer ». Un nom fort à propos pour ce géant qui passe l’essentiel de sa vie sur la banquise mais est capable de nager des centaines de kilomètres. Créature majestueuse du grand nord, l’ours polaire est le plus grand carnivore terrestre au monde. Son incroyable adaptation à l’environnement hostile de l’Arctique en fait une espèce à part.
Mais dans la région, les températures augmentent deux fois plus vite que dans le reste du monde, causant de nombreux bouleversements comme la réduction de la banquise, la fonte du pergélisol et l'élévation du niveau de la mer. Tout cela a des répercussions sérieuses sur l’ours blanc dont la survie dépend de la glace. Si la fonte se poursuit au rythme actuel, la surface de son habitat estival se sera contractée de plus de 40% d’ici le milieu du 21ème siècle, faisant diminuer sa population de plus de deux tiers. L'Arctique, qui renfermerait 13% des ressources mondiales non découvertes de pétrole et 30 % de celles de gaz naturel, attise également les convoitises des entreprises de production d’énergies carbonées. L’intensification du commerce maritime qui s’accompagne de naufrages, de déversements d’hydrocarbures et de l’introduction d’espèces non indigènes, constitue une menace supplémentaire. Enfin, la surpêche et la pêche illégale, liées à l’exploitation du caviar et du saumon, fragilisent l’écosystème…
Redonner un avenir aux ours blancs
Afin de pouvoir protéger au mieux l'ours polaire, il est important d' identifier les zones clés de son habitat et de comprendre son comportement. C'est pourquoi le WWF utilise des colliers GPS.
L’ours polaire, icône charismatique de l’environnement arctique, est depuis longtemps au cœur de nos actions, dont les plus anciennes ont été initiées dès 1972. Dans notre stratégie globale de conservation, la lutte contre le dérèglement climatique est l’un de nos sujets prioritaires. Les chercheurs ont besoin de comprendre ce qui se passera pour l’espèce quand la banquise aura fondu. Pour y parvenir, nos équipes utilisent des colliers GPS aussi légers que compacts permettant de suivre les mouvements des ours en temps réel. Ces derniers vivant dans un habitat reculé et difficile d'accès, recueillir des données de bonne qualité les concernant n’est jamais simple. Nous nous engageons également en faveur de la création d’espaces protégés : identifier les zones clés de l’habitat des ours polaires (zones de nourrissage, tanières, routes migratoires) et plaider pour leur protection. Par ailleurs, nous soutenons différents projets de recherche au profit de l’ours polaire afin d’optimiser les actions de conservation relatives à l’espèce et nous nous engageons contre les menaces de la navigation et de l’exploitation du pétrole et du gaz en Arctique.
Faciliter la collecte de données
Les drones et caméras thermiques ont permis de repérer une tanière habitée par une femelle et ses deux oursons !
Le survol de la banquise en hélicoptère est à la fois coûteux et invasif. Les expéditions en bateau, elles, sont très difficiles en raison des températures extrêmes des régions arctiques, même pour les chercheurs les plus expérimentés. Le déploiement de drones constitue donc une alternative intéressante pour les chercheurs. C’est pourquoi le WWF Russie a souhaité apporter son soutien à une mission pilote au cœur de la réserve naturelle de l'île Wrangel à Tchoukotka.
La zone n’a pas été choisie au hasard puisqu’il s’agit du lieu de prédilection des ourses gestantes. C’est là qu’une majorité d’entre elles vient mettre bas au sortir de l’hibernation.
Au total, quatre drones ont été mis à disposition, pilotés par une équipe de huit experts. Deux d’entre eux disposaient de caméras thermiques, un véritable atout dans la région. En effet, habituellement, les experts circulent à motoneige, explorant chaque pente, chaque vallée, chaque recoin où la plus fine des couches de neige peut dissimuler une tanière. Souvent, tel un miroir, le soleil de printemps qui se réfléchit sur la neige vient compliquer la tâche. À l’intérieur de l’abri de l’ours, la température est plus élevée. Lorsque vous survolez une tanière à l’aide d’un drone thermique, un halo s’affiche sur le panneau de commande aidant ainsi grandement au repérage. En raison d’un timing particulièrement serré et d’un vent du nord déviant fortement les trajectoires des engins, l’expérience n’a pas pu être menée à terme. Mais les premières images récoltées après un survol d’une heure et demi sont précieuses. Elles ont mis en évidence la présence d’une tanière et de ses habitants, une femelle et ses deux oursons, et leur décryptage détaillé permettra d’améliorer notre niveau de connaissance quant aux comportements de l’espèce. Ce premier test aura aussi été riche d’enseignements pour réussir le prochain recensement !