Le rhino noir reprend des couleurs
Bonne nouvelle pour le pachyderme, joyau du patrimoine africain. En Tanzanie, dans le parc national du Serengeti, une femelle vient de mettre bas. Dans la région, c’est la première naissance d’un rhinocéros noir depuis des décennies.
Des cornes d'or
Autrefois, le rhinocéros noir était très répandu, il occupait la majeure partie du continent africain. Mais la disparition de son habitat naturel et le braconnage ont conduit à un déclin accéléré de sa population. Les rhinocéros sont tués massivement pour leurs cornes, consommées tout simplement comme un symbole de richesse ou vendues au marché noir asiatique car on leur prête des vertus dans la guérison du cancer et comme aphrodisiaque.
En 1977, la CITES, Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées, interdit le commerce du rhinocéros. Entre 1990 et 2007, c’est une quinzaine de rhinocéros qui sont tués annuellement en Afrique du Sud. Mais à partir de 2008, les choses changent brutalement, le nombre d’animaux braconnés explose pour atteindre le chiffre record de 1 215 en 2014! La demande ne cesse de croître et les braconniers se font de plus en plus inventifs.
Combattre le braconnage
Les trafiquants ont recours à des méthodes de plus en plus sophistiquées pour échapper aux autorités, y compris l’usage d’hélicoptères et d’un matériel de vision nocturne pour traquer les rhinocéros, et l’administration de produits vétérinaires pour les assommer.
Le WWF travaille avec TRAFFIC pour enquêter, identifier et démanteler les réseaux responsables du braconnage et du commerce illégal de corne de rhinocéros, ainsi que pour faire diminuer la demande.
Le WWF est l’une des toutes premières organisations à s’être engagée dans la lutte contre le braconnage des rhinocéros, luttant sur tous les fronts. D’abord, combattre le braconnage en s’attaquant à l’ensemble des acteurs de la filière : braconniers évidemment mais aussi intermédiaires, exportateurs, transporteurs et consommateurs. Le WWF lutte également contre les organisations criminelles, les fausses thérapies basées sur les soi-disant vertus de la corne de rhino, la faiblesse des peines sanctionnant un commerce très lucratif. Pour ce faire, nous nous mobilisons pour faire appliquer la loi par le renforcement de la coopération internationale, l’élaboration d’une base de données d’’ADN (pour confondre les braconniers), par une meilleure capacité d’action et par un contrôle renforcé aux frontières.
Un heureux présage
C'est le nombre de rhinocéros noir (Diceros bicornis) qu'on compte actuellement dans le monde.
La plaine du Serengeti est une savane de 60 000 km² à cheval sur la Tanzanie et le Kenya. Serengeti signifie « plaines sans fin » en langue maa. Théâtre de la migration annuelle de milliers d'animaux, elle abrite plusieurs réserves naturelles, dont le parc national du Serengeti. Et c’est dans ce havre de paix qu'en septembre dernier neuf rhinocéros noirs provenant d’Afrique du sud ont été réinstallés. L’objectif ? Repeupler les espaces protégés du pays de cette espèce menacée d'extinction.
Selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), il reste environ 5 000 rhinocéros noirs à l'état sauvage, ce qui les place parmi les animaux les plus menacés du monde. Mais selon la Frankfurt Zoological Society, grâce aux programmes de repeuplement et de renforcement de la lutte contre le braconnage, le nombre de rhinocéros augmente légèrement depuis quatre à cinq ans. Tandis que l'écosystème constitué par le Serengeti et le Masaï Mara, son prolongement côté kényan, abritait il y a 40 ans de 500 à 700 rhinocéros, le braconnage avait réduit leur population à une dizaine d'individus en 1977-1978. Or, aujourd’hui, la région compterait environ 160 animaux.
Le mois dernier, l’une des femelles importée en septembre, Lindiwe, a même mis bas. Cela fait plusieurs décennies qu’un rhino noir n’était pas né dans la région. Bien entendu, une naissance est toujours un heureux événement mais celle-ci revêt une importance particulière. « Condamné » : voilà ce qu’on pouvait lire en une du journal britannique The Daily Mirror en 1961 à propos du rhinocéros d’Afrique. Le journal avait prédit sa disparition qu’il attribuait à la stupidité, la cupidité et la négligence des hommes. Il semble pourtant que le rhinocéros noir n’ait pas dit son dernier mot...