Retour de l’esturgeon dans le Danube
Plus de 20 000 bébés esturgeons ont été relâchés dans le Danube la semaine dernière. L’objectif ? Faire renaître l’espèce menacée de disparition, en raison, notamment, de notre amour du caviar…
Pour approfondir le sujet :
EsturgeonsEspèce à la dérive
Le nombre d’esturgeons présents dans les principaux bassins a diminué de 70% au cours du dernier siècle.
Il peuple nos cours d’eau depuis plus de 250 millions d’années. Véritable animal préhistorique, l’esturgeon appartient à l’une des plus anciennes familles de poissons osseux en vie. Facile à reconnaître, avec son corps allongé et pointu aux deux extrémités et sa tête en forme de bec, il peut mesurer jusqu’à 3 mètres !
Hélas, aujourd’hui, l’espèce est en danger. Les barrages érigés par les hommes le long des rivières perturbent ses routes migratoires et entravent l’accès aux sites de reproduction. Sans oublier les extractions de granulats qui détruisent ses frayères et la surpêche qui réduit considérablement ses effectifs. Mais c’est surtout notre engouement pour la « perle noire » qui fragilise sa population. Depuis les années 1930, ses œufs, que nous consommons sous la forme de caviar, sont très convoités, alors qu’ils servaient jadis de nourriture aux cochons et aux poules. L’esturgeon est maintenant totalement interdit de pêche mais malgré cette protection, sa population continue de régresser.
Aujourd’hui, il est le poisson migrateur le plus menacé d’Europe. L’espèce classée en danger critique d’extinction ne compterait plus que quelques centaines d’individus.
Restaurer l’espèce à l’état sauvage
Le WWF œuvre pour attirer l’attention sur le risque d’extinction des esturgeons et promeut une gestion durable des espèces.
Ce n’est pas parce que l’esturgeon est moins photogénique que le panda ou le dauphin qu’il faut laisser s’éteindre l’espèce ! Le poisson joue un rôle primordial dans la chaîne alimentaire et contribue également à l’équilibre du milieu naturel dans lequel il vit. Depuis plusieurs années, le WWF œuvre pour sensibiliser à la problématique de l’esturgeon, s’efforçant d’attirer l’attention des décideurs sur son triste sort. Notre objectif ? Les convaincre d’adopter des politiques de conservation ambitieuses afin de rétablir une population viable d’esturgeon à l’état sauvage. En parallèle, nous luttons contre le braconnage et le trafic de caviar en collaboration avec TRAFFIC, programme commun de protection des espèces du WWF et de l’UICN.
Le WWF Ukraine a également mis en place, dans le cadre du projet « LIFE for Danube Sturgeons », l’initiative « Sturgeons watchers ». Cette initiative vise à sensibiliser et à faire participer des étudiants en agriculture et en écologie de la région à la protection des esturgeons et à la conservation de leur habitat aux côtés des différents acteurs prenant part au projet.
L’espoir renaît
Entre 2014 et 2015, plus de 50 000 jeunes esturgeons russes ont été mis à l’eau.
C'est le grand saut pour les 20 000 alevins d'esturgeon que l’on vient de relâcher dans le Danube ! Un énorme plouf, une salve d’applaudissements, suivie de « bravos » enthousiastes. Ces bébés, qui mesurent à peine 10 cm, sont porteurs d’un nouvel espoir pour leur espèce au bord de l’extinction. Issus de fermes d’élevage, ils ont parcouru des centaines de kilomètres dans un camion-citerne avant de goûter enfin à la liberté ! Le lâcher, effectué à l'aube est le dernier d'une longue série, vaste opération menée par le WWF Bulgarie et cofinancée par l'Union européenne, pour repeupler le fleuve.
Entre 2014 et 2015, plus de 50 000 jeunes ont été mis à l’eau. Chacun d’entre eux est « marqué », porteur d’un numéro accroché à un minuscule fil métallique traversant sa nageoire gauche. Nous prélevons ainsi régulièrement des individus pour mesurer leur croissance et suivre leurs déplacements. Autant d’informations indispensables pour la protection de l’espèce. Si les esturgeons vivent longtemps, ils ne se reproduisent que quelques fois dans leur vie. Les spécialistes qui ont introduit les alevins font néanmoins le pari qu'une majorité d'entre eux survivra et pourra, d'ici trois à quatre ans, pondre à son tour dans le Danube…